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Redeker

  • Un rugby blues spectral joué par des ectoplasmes bodybuildés

    Un rugby blues spectral joué par des ectoplasmes bodybuildés
    (sur un article de Robert Redeker)

     par Mezetulle

    Je viens de lire un article de Robert Redeker paru dans la dernière livraison de la revue Les Temps modernes (n° 645-646, déc. 2007) intitulé "La Coupe du monde hantée par les spectres du rugby".  Réfléchissant sur une "mutation dont le sport a été l'objet ces deux dernières décennies" - c'est-à dire, à travers sa professionnalisation et ce qu'on medium_TempsmodernesJan08.GIFpourrait appeler une sorte de gladiatorisation, la disparition du jeu et sa dévoration par le sport-spectacle lourdement sponsorisé et manipulé par l'univers marchand -, Redeker propose une analyse sombre de la dernière Coupe du monde. Le rugby est, selon lui, le dernier produit un peu frais que le marketing sportif s'est mis sous la dent pour le placer en tête de gondole d'un supermarché où il ne pourra que se frelater et perdre toute sa saveur. Témoin, l'alignement des gabarits sur celui d'un superjoueur "robocop" en lequel on ne peut plus se reconnaître.

    La problématique des relations perverses entre jeu et sport (1) est mobilisée pour conduire à une conclusion déprimante qui convoque des ectoplasmes bodybuildés sur le terrain :

    Ce qui jusqu'il y a une vingtaine d'années n'était qu'un jeu sans prétentions, un sport amateur, est devenu un sport important. Dévoré par l'esprit de sérieux engendré par les enjeux économiques, les investissements financiers, l'obligation de faire de l'audimat [...], le rugby vient de subir une funeste mutation. Pendant cette coupe du monde, l'amateur nostalgique et éclairé n'aura pu voir que des spectres. [...] Plus le rugby s'intègre au télé-spectacle mondial, plus il se peuple de fantômes.

    Même si on n'est pas d'accord sur toute la ligne ici avec Robert Redeker, même si la supportrice du prétendu "rugby-paillettes rose vif" que je suis en prend pour son grade, même si on retrouve avec un peu d'agacement les soupirs du "tout-fout-le-camp" cher au rugby-blues, c'est toujours un plaisir de lire ses textes musclés, exaltants et dépressifs à la fois. Ce n'est pas son moindre mérite que de rappeler fortement que, un peu comme la danse, le sport consiste avant tout à bouger pour rien. 

    1 -Je me permets de renvoyer à un article sur ce sujet publié dans mon blog principal : Sport, jeu, fiction et liberté: W de Georges Perec.

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