Un ballon à écailles ? Une contingence peut en chasser une autre
par Mezetulle
Un ballon transformé par la pluie en savonnette, essuyé, caressé dérisoirement et archaïquement avec une serviette de toilette avant le lancer en touche... C'est ce qu'on a vu encore la semaine précédente dans la pataugeoire du Stade Aguilera à Biarritz, où chaque chute s'accompagnait d'une gerbe d'éclaboussures comme on n'en voit que dans les bandes dessinées... et sur les terrains de rugby.
Qu'est-ce qui fait glisser le ballon, et le métamorphose en gigantesque glaçon ovoïde insaisissable qui, telle une fusée, s'échappe d'autant plus vite qu'il est fortement enserré ? Pas seulement l'humidité : la forme ovale prend sous la pluie et dans la rosée les propriétés d'une double queue de poisson. Et ce ne sont pas les petits picots du revêtement qui peuvent arrêter la glissade vers les extrémités. D'où l'idée d'un revêtement qui ressemblerait à des écailles élasmoïdes miniature ... mais implantées à l'envers, à rebrousse-poil si l'on peut dire, et symétriquement de part et d'autre, de sorte que la prise soit recentrée vers la panse et que la fuite vers les pointes soit sinon bloquée, du moins empêchée. Essayez donc de faire glisser un poisson dans vos mains de la queue vers la tête en le serrant...
On sait que bien des techniques dont on aurait aujourd'hui du mal à se passer (fermeture éclair, attaches velcro) sont inspirées d'un modèle existant dans la nature - en l'ocurrence les micro crochets dont l'imbrication forme les plumes de certains oiseaux. Pour remplacer les peaux de phoques sous les semelles des skis de randonnée, on utilise déjà depuis longtemps des sortes d'écailles de synthèse qui bloquent le retour du ski vers l'arrière à la montée sans freiner son glissement vers l'avant à la descente. Il n'est donc pas si étonnant que des équipes de chercheurs travaillent aujourd'hui à transposer cette technique, en la miniaturisant, à la saisie d'une gonfle ovoïde chargée de pluie par des mains gantées de boue...
Les choses sont cependant loin d'être au point et il n'est pas encore question d'introduire cette nouveauté sur les terrains en dehors de quelques expérimentations - reste notamment à résoudre le problème du comportement de la balle dans le jeu au pied et surtout celui de son évolution aérienne. En effet, les micro-écailles offrant une résistance alternée à l'air, le ballon devient totalement instable dès qu'il s'élève rapidement. On ne ferait donc, en l'état actuel des recherches, qu'échanger une contingence contre une autre. Le temps des spectaculaires et comiques en-avants humides, celui des serviettes de toilette sur le banc de touche n'est donc pas près d'être détrôné.
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Commentaires
Et les bons vieux ballons en cuir, le wallaby de chez adidas...Dès qu'il pleuvait, il pesait 3 kilos et une sorte de pellicule gélatineuse se formait à sa surface...Il suffisait de ne pas avoir la balle pour gagner le match...Je trouve que les ballons actuels ne se comportent pas si mal par temps de pluie.